Depuis plusieurs semaines, notre pays vit une pénurie de carburant sans précédent. À Bamako comme dans plusieurs régions, les dossiers d’attente s’allongent, les moteurs se taisent, et nos compatriotes subissent la crise.
Ce n’est pas une simple crise logistique. Comme on le sait, c’est une stratégie de « l’internationale barbare », orchestrée par des groupes armés qui prétendent agir au nom de la religion, cette même religion qui, dans son essence, est vecteur de paix, de justice et de fraternité. Mais on le sait, les sponsors étatiques sont dans une guerre par procuration qui se nourrit d’imposture. Ces attaques ciblées contre les convois d’hydrocarbures, ce blocus cynique, ne sont rien d’autre qu’une guerre contre les paisibles populations maliennes. Une guerre contre leur droit à vivre, à se déplacer, à travailler. Une guerre contre leur dignité.
Mais le Mali n’est pas un pays sans mémoire. Il est le fruit d’une civilisation millénaire, façonnée par les empires du Ghana, du Mali et du Songhaï. Il est le berceau de Tombouctou, cité des savoirs et des manuscrits, où la parole écrite et la sagesse orale se sont unies pour bâtir une société de tolérance et de grandeur. Les communautés maliennes, dans leur diversité ethnique et culturelle, ont toujours puisé leur force dans l’unité, la solidarité et le respect mutuel.
C’est tout cela qui façonne la dignité dont font montre nos compatriotes, dans les longs fichiers dans les stations-services, subissant mais avec hauteur et calme. Ils savent tous le contexte géostratégique, les enjeux et les objectifs funestes de ceux qui veulent simplement mettre le Mali de Modibo Keita en coupes réglées.
Le réveil de l’Afrique s’ouvre, par le Mali et les Etats du Sahel, non sans adversité comme il en été de tous les temps. Des écrivains comme Amadou Hampâté Bâ, dit dans Amkoulel, l’Enfant peulh : « si vous voulez faire une œuvre durable, soyez patients, soyez bons, soyez vivables, soyez humains ». C’est cela que l’Africain a de plus que les autres, plus formatés dans la barbarie. Le sénégalais Cheikh Hamidou Kane, dans L’Aventure ambiguë, interroge la tension entre tradition et modernité, entre soumission et liberté. Et Seydou Badian Kouyaté, dans Sous l’orage, célèbre la résistance des peuples africains face aux bouleversements imposés de l’extérieur. C’est de tout cela que le Malien et le Mali tirent leur force pour résister. Et la résistance suit son cours jusqu’à la victoire, à la souveraineté consolidée.
Aujourd’hui, les Maliens ne sont pas dupes. Ils comprennent les enjeux géostratégiques qui sous-tendent ces adversités. Ils savent que derrière les groupes terroristes se cachent des États sponsors, des intérêts étrangers qui veulent affaiblir le Mali, le diviser, le soumettre.
Le peuple malien, d’anciens à plus jeunes, est éveillé. Il sait lire entre les lignes, décrypter les manœuvres, et surtout, il sait tenir.
Le Mali tiendra. Parce que les Maliens sont le socle de cette nation. Parce que leur dignité est plus forte que la peur. Parce que leur histoire est un chant de résilience. Et parce qu’à l’heure du Mali, c’est la puissance du peuple qui écrit l’avenir. Et quand la dignité se met à la puissance malienne, elle est une digue contre toutes les velléités.
Alassane SOULEYMANE
Source: L’Essor
